5 Janvier 2017
Corps de femme, blanches collines, cuisses blanches,
tu ressembles au monde dans ton attitude d'abandon,
Mon corps de laboureur sauvage te creuse
et fait jaillir le fils du fond de la terre.
Je fus seul comme un tunnel. Les oiseaux me fuyaient,
et en moi la nuit pénétrait dans son invasion puissante.
Pour me survivre, je t'ai forgée comme une arme,
comme une flèche à mon arc, comme une pierre à ma fronde.
Mais l'heure de la vengeance tombe à pic, et je t'aime.
Corps de peau, de mousse, de lait avide et ferme.
Ah, les vases de la poitrine ! Ah les yeux de l'absence !
Ah les roses du pubis ! Ah ta voix lente et triste !
Corps de femme mienne, je persisterai en ta grâce.
Ma soif, mon désir sans bornes, mon chemin indécis !
Lits de rivières obscurs où la soif éternelle continue, et la douleur infinie.
Pablo Neruda - "Corps de femme, blanches collines"
in "Vingt poèmes d'amour et une chanson désespérée".
Gallimard, Collection Poésie.