8 Février 2018
Cette rose, c’est ma maîtresse,
Digne d’un dieu, d’un immortel.
Cette rose, c’est sa poitrine,
C’est sa cuisse au contour nerveux,
C’est sa peau, c’est l’odeur divine
Qui coule de ses bruns cheveux.
C’est toi tout entière, ô Sophie
Quand ton corps souple et musculeux,
Sous ma grosse face bouffie,
Sous mon front large et pustuleux
Se débat et roule en délire,
Comme dans le creux du ravin,
La nymphe, sous son vieux satyre,
Tout gonflé d’amour et de vin.
Va, tu n’es pas une Française,
Qui n’aime que du bout des dents,
Ton corps en prend tout à son aise,
Et tes baisers sont bien mordants !
Oh ! viens, ma bacchante romaine,
Laisse mon bras te dérouler,
Laisse-moi boire ton haleine,
Laisse-moi te décheveler !
O Dieu ! que ma Sophie est belle,
Quand le rouge lui monte au front !
Que de beautés son corps révèle
Dans cet instant sublime et prompt !
Son oeil blanchit et s’illumine,
Et son flanc plein de volupté
Surpasse en ardeur Messaline
Et l’antique lubricité !
Honoré-Gabriel Riquetti de Mirabeau (oui, celui du pont) - "Lettres à Sophie".