4. Benjamin Sanial
Cette façon d'ouvrir la porte, il
la reconnut entre mille, comme il venait de reconnaître le silence qui la précéda et le bruit juste avant le silence. Linda, elle, prit ceci pour un râle de plaisir supplémentaire qu'elle
s'appropria aussitôt. "Ça va péter " se dit-il, elle le sentit et se releva aussitôt, les yeux apeurés. "Il a pété" avait-elle compris. Avec une dextérité comme pas deux, Malko extirpa le
calibre de son souple étui lustré. Lui-même sentait encore dans son cerveau un engourdissement certain. Pour ne pas dire un certain gourdin. Il savait bien que La Femme était son pire
ennemi juste après son pire ennemi. Et justement, il se trouvait face aux deux. En un éclair tout ne fut que feu, flamme et foutoir, qu'enfer foufoune et Félicité, le serveur métisse
derrière le comptoir, se mit à genoux suppliant les dieux et les nems sacrés que toutes les balles lui passent au-dessus de la tête. Il n'était pas fier ce félon de Félicité, cette fiente
affreuse et affolante. La folie furieuse s'emparait de lui quand il décida de bondir hors de sa cachette. Mais L'immonde Rocco ne laissa pas passer une telle chance, Rocco la racaille
comme le surnommaient à l'école ses camarades qu'il s'empressait aussitôt de faire taire pendant la pause cigarettes dans les toilettes De Dietrich. L'immonde Rocco ne le rata pas. Il ne
rate jamais rien et le déplacement lourd de l'homme fut pour lui une cible facile. Lui qui chaque fois qu'il le pouvait organisait des chasses à l'homme, lui l'immonde brute, le vilain,
la petite pute de salopard de merde. Lui qui avait fait souffrir tant de famille, dans un geste souple et animal, l'abattit d'une balle entre les deux yeux. Certes il était de dos, mais
qu'importe, au sortir de la balle, les yeux n'étaient plus à la même place. Malko eut juste le temps de protéger Linda en l'envoyant sous une table
Habitat...
5. P-A Gillet
Tandis que Félicité se vautrait
dans son nouveau statut de cyclope et dans une mare de sang qui était le sien, Malko s'assura que Lynda n'avait pas été touché en la palpant ostensiblement un peu partout mais surtout
ses tétons turgescents. Une fois cette inspection de routine terminée, Malko sortit son Sony à reconnaissance vocale et mémoire de plus de cent numéros et composa le numéro d'Elko
Krisantem, son fidèle factotum et néanmoins complice de brisure d'os en tout genre. Elko attendait patiemment dans la Jaguar, non loin de là, voire même à deux rues d'ici. La jeune
Comorienne qui s'activait de bas en haut avec parfois un léger mouvement circulaire et lingual fut éjectée de la voiture en une nano seconde et se retrouva incrustée dans le baobab
géant qui servait d'ombrelle à la voiture. Celui-ci fit crisser les pneus parce que c'est toujours comme ça dans les SAS, et partit en trombe oubliant que le bar n'était qu'à une rue de
là. Voyant son erreur, il fit marche arrière et renversa une petite vieille décatie et sèche comme un coup de trique avant de faire voler en éclats la devanture du bouge infâme dans
lequel Malko était coincé tel Custer en pleine réserve indienne. Il releva Lynda d'une main ferme et au panier et s'engouffra dans la chic Anglaise. Instantanément, l'odeur du cuir
Connoly lui titilla les narines et lui rappela la douce Margaret, une femme de poigne bien qu'un sacré tas de chair.
Il reprit ses esprits et ordonna à Elko de
retourner rapidement et quand même le plus vite possible à sa suite de l'Intercontinental où une bonne bouteille de Dom Pérignon n'attendait que lui pour lâcher son flot de bulles à haute
teneur benzénique au fond de sa gorge profonde comme dirait Lynda (pas celle de Malko, la Lovelace...).
Elko, le regard serré et la mâchoire au loin, comprit au sourire de Malko que
la jeune Comorienne avait oublié de lui rentrer son dard étincelant dans le pantalon. Il pendait, flasque comme une montre de Dali sous Tranxène. Enfin arrivés, Malko tira Lynda hors de
la voiture en attendant de le faire dans le jacuzzi qui surplombait la ville. Avant de rentrer dans Lynda et dans la chambre, il s'assura que la pièce était vide de tout autre occupant.
Un laveur de carreaux finissait son travail mais Malko, par conscience professionnelle, lui vida son chargeur. Il n'aurait pas dû sourire. Lynda s'approcha langoureusement de Malko
et...
6. Jérôme Lemoine
… La porte s'ouvrit : c'était
Elko. "Je ne dérange pas?" s'enquit la brute aimable. Malko, répondant pour Lynda, le rassura sur ce point. Un ami peut toujours débarquer à n'importe quelle heure, pensa-t-il, même en
plein milieu d'une érection ( Malko avait régulièrement des érections d'une heure). En d'autres temps, il se serait illico concentré sur une locomotive, une trépanation, une équation à
multiples inconnues ou tout ce qui peut soulager l'étoffe délicate d'un pantalon Mario Puzzolli acheté en free taxe à l'aéroport de Dubaï. Mais pas avec Elko, pas avec un ami avec qui
on a tout partagé, les mêmes dangers, les mêmes requins, les mêmes filles parfois, auraient-ils eu la même mère, Elko aurait été un frère. L'homme montagne retira sa veste étriquée qui
sembla pousser un ouf de soulagement en volant jusqu'au portemanteau. Une large chemisette hawaïenne, où les grands pétales d'orchidées fuschias le disputaient aux auréoles de
transpiration, apparut alors : il semblait qu'un jardin botanique avait envahi la modeste suite, mais ce n'étaient pas les fleurs qui embaumaient le
plus.
'' Un verre ?'' demanda Malko en
s'accroupissant jusqu'au minibar. Il prit pour un oui le grommellement rauque sorti de la chemisette Inter Flora. Les yeux à hauteur des cacahuètes sous vide, il n'oublia cependant pas
sa galanterie génétiquement transmise par les générations de hobereaux autrichiens qui constituaient sa glorieuse lignée : Et toi Lynda, tu veux encore te rincer le gosier? dit-il en
caressant le fox-terrier d'une mini bouteille de Black&White.
Malko n'avait dit cela que pour une seule raison : tester la jeune femme sur
sa capacité à saisir les double sens et, par la même, les potentialités de ses deux hémisphères (les seuls qu'il lui était impossible de tâter). Au '' Oui, j'ai soif'' qu'il reçut
pour toutes réponses, Malko en déduisit que Lynda était seulement dotée de capacités cérébrales élémentaires : lever le genou quand on le frappe, ouvrir la bouche quand un gland se
projette à l'envers sur la rétine, et donc boire… Ou alors, elle cachait bien son jeu…
7. P-A Gillet
Grisée tant par le whisky que
par les derniers évènements, Lynda tituba jusqu'au jacuzzi où elle plongea, tête la première. Relevant ses cheveux d'un geste l'Oréalien car elle le valait bien, Lynda lissa sa robe
indécente. Dans un concours de tee-shirt mouillé, le jury l'aurait plébiscité haut la main, l'autre étant occupée à de basses besognes. Pour l'instant, la seule idée qu'elle avait
dans la tête se trouvait à un bon mètre sous sa tête, dans un endroit humide à souhait.
Elle fit signe à Malko, d'un geste sans
équivoque, qui signifiait à la fois : "mets-là moi toute" et "mmmm, encore, ton corps, mon corps". Malko, sans se départir de son flegme autrichien, moins connu que le
Britannique mais tout aussi efficace, arracha d'un seul geste sa chemise Burps and Beurk, son pantalon Mario Puzzolli, son caleçon Froutovzeloum, ses chaussettes Old Groenland et même
sa Seiko Quartz à mouvement perpétuel, ce qui n'était pas une mince affaire à faire tout ensemble. D'un regard, il congédia Elko dont les quarante douze centimètres de barbaque
s'affolaient en frétillant dans son pantalon Licoupeur. Elko rangea ses démangeaisons au placard et partit de suite retrouver la jeune Comorienne sans glotte. Malko plongea à son tour
dans le bain bouillonnant qui, pourtant, n'était pas en marche. Probablement le Chili de midi, pensa-t-il. Il pensait bien. Aussi désirable qu'elle fut, Lynda refoulait sévère de la
rosette, ce qui donnait à toute intention de feuille de rose une touche pastorale tendance sanibroyeur SFA. Le téléphone sonna. Malko sortit du bain et jeta une prude serviette sur sa
proéminente proue. C'était Edgar, son vieil ami du FBI. Sacré Edgar.
8. Jérôme Lemoine
''Malko, on a retrouvé la trace de Malo Stavrine!'' La phrase résonna étrangement dans l'oreille de
Malko. Malo, le Chien de Sibérie ! Ou La Douleur de l'Equateur, c'est selon. Fruit d'un viol contre-nature entre un ancien gardien de Goulag et une jeune comptable du régime
Castriste, Malo Stavrine était ce que la Terre pouvait porter de pire, sauf quand il était en avion. Malo était tout sauf un saint. Où ça, s'enquît Malko. Au Founana's, rétorqua la
voix fatiguée d'Edgar. Le Founana's ! explosa Malko, mais c'est à Budapest ! Et alors ! dit Edgar sans se démonter, tu crois que t'es où? À Pnom Pehn? Exactement dit Malko pour lui
clouer le bec : pour appuyer ses propos, il tendit le combiné vers la fenêtre afin que son interlocuteur entende bien les bruits de la rue. Dehors, des prostituées vendaient leurs
services en version originale. Alors, dit Malko en reprenant le combiné, tu me crois maintenant?… Ok ok, admit Edgar, mais si j'étais de mauvaise foi, je pourrais te dire qu'il y a
une forte communauté Cambodgienne à Budapest. Excuse-moi de t'avoir dérangé, vieux! Malko raccrocha. Il allait revenir dans Lynda lorsque l'appareil sonna à nouveau. C'est Edgar, ce
bon vieil Edgar. '' On a retrouvé la trace de Npenpe De Clerk!…
Npenpe de Clerk! La phrase résonna étrangement dans
l'oreille de Malko. Npenpe, la Chacal du Transvaal ! Ou La Frayeur du Kalahari c'est selon.
Fruit d'un viol ''sans consentement dans un premier temps'' entre un policier de Soweto et une jeune
secrétaire de Mandela, Npenpe De Clerk était ce que la Terre pouvait porter de pire, sauf quand il nageait. Npenpe avait la peau noire mais le cœur d'un Blanc, de quoi être
déstabilisé quand il allait pisser dans des latrines publiques au mauvais temps de l'Apartheid. ''Où ça ?'' s'enquît Malko. A Pnom Pehn, répliqua Edgar, dans le quartier
Hongrois, c'est pour ça que je m'étais trompé. Rends-toi dare-dare au Debrecen et demande un goulasch à Imre, c'est le patron. Malko raccrocha. Il se tourna vers le jacuzzi où Lynda
continuait de se toucher. ''Il faut que j'y aille !''. Et pour bien clore la discussion, il lui éjacula dans les cheveux.
... À suivre... dès
demain.