... Je ne parle pas souvent de cinéma. D'une, je n'y vais pas souvent, ayant été souvent très déçu ces dernières années car je suis
très chiant cinématographiquement parlant. De deux, c'était quoi déjà le point deux ? Bon, il ne devait pas être important. Quoi qu'il en soit, très peu de films ont eu grâce à mes yeux ces dix
dernières années. Je peux compter sur les doigts d'une main d'une lépreuse les films qui m'ont vraiment retourné. J'en compte 3 majeurs plus deux hors compétition que je n'aborderai que
rapidement aujourd'hui mais qui ne sont pas moins intéressants pour autant.
Le premier : La Ligne Rouge de Terrence Malick.
Prenez un film de guerre, secouez, ajoutez une pléïade d'acteurs qui tueraient père et mère pour être dans la distribution,
saupoudrez d'un réalisateur de génie qui distille ses films au compte-goutte et vous aurez un chef-d'œuvre. Car si Terrence Malick filme la guerre au plus près, s'intéresse autant aux vainqueurs
qu'aux vaincus, il arrive entre les bouts de viandes à hacher humaines, les horreurs d'un conflit et la joie, la peur et la peine à faire un film qui n'est pas un film de guerre. La Ligne Rouge
est une pure poésie d'un peu moins de 3 heures sur l'espèce humaine, qu'elle soit noire, jaune, rouge ou bleue. Si vous ne l'avez jamais vu... vous avez tort. Sean Penn, Adrien Brody, Nick
Nolte, Georges Clooney, John Travolta, John Cuzack, Mickey Rourke, Billy Bob Thornton,Woody Harrelson et pas mal d'autres sont au casting de cette histoire d'hommes autour de la bataille de
Guadalcanal. Pas de super-héros testostéronés chez Terrence Malick, juste des hommes ordinaires perdus dans une nature sublime, en plein cœur d'un combat inhumain.
Allez, passons à un peu plus de paix. Le second film qui m'a marqué plus que durablement ces dernières années n'a rien à voir avec
la profusion des images de Malick. Dans celui-ci, tout est calme, volupté et poésie aussi car c'est du film "Il Postino", "Le Postier" en VF, que je veux vous causer. "Il
Postino" est le dernier film de Massimo Troisi, grand acteur italien qui passa outre l'avis de ses médecins qui lui recommandaient de se faire opérer du cœur. Il préféra retarder
l'opération, tourna le film qui lui tenait tant à cœur et succomba à une crise cardiaque deux jours après la fin du tournage. Il narre la rencontre d'un postier inculte et analphabète amoureux
d'une belle du village avec le poète Pablo Neruda, sublimement interprété par Philippe Noiret. L'action se passe dans les années 50 sur une petite île italienne où Neruda vient s'exiler pour
écrire. Mario Ruoppolo, nouveau facteur sur l'île se lie d'amitié avec Pablo Neruda qui va lui apprendre les secrets de la poésie pour enfin conquérir la belle de ses rêves, la sublime Beatrice
Russo, arghh, que campe avec talent Maria Grazia Cucinota. Re-argh. Un instant de grâce absolue d'1 heure et 48 minutes qui vaut son pesant de vers.
Allez, je vous en mets un troisième. "Trois enterrements" (en VO : Los tres entierros de Melquiades
Estrada) datant de 2005 est le premier film de Tommy Lee Jones au cinéma en tant que réalisateur. Et pour un coup d'essai, on peut dire que c'est un coup de Maître. Le film est lent,
très lent, lancinant même et pourtant, il dure à peine deux heures. Melquiades Estrada, travailleur illégal est retrouvé mort en plein désert. On l'a enterré à la va-vite et pas grand
monde ne semble se soucier de retrouver son meurtrier. Les autorités font semblant de s'y pencher mais la mort d'un immigrant clandestin au bord de la frontière avec le Mexique,
n'intéresse pas personne. Personne à part son meilleur ami Pete Perkins (Tommy Lee Jones) qui décide de mener sa propre enquête, trouve le meurtrier, un garde-frontière. Il décide de
lui faire déterrer le corps afin de le ramener chez lui au Mexique. Dans un monde déshumanisé où les étrangers ne valent pas grand-chose (ça ne vous rappelle rien?), seul Pete Perkins
semble encore doué de sentiments. Le parcours semé d'embûches qui les mènera ou pas, au lieu de la dernière sépulture de Melquiades Estrada, vaut le détour et pas seulement pour les
sublimes plans sur le désert qui sépare les USA du Mexique. Une humanité à fleur de peau, une réalisation sobre, sublime. Si vous n'avez pas vu "Trois Enterrements", c'est que vous
n'êtes plus tout à fait vivant. Foncez.
J'aurai pu aussi vous parler de deux films avec le même acteur. Deux films de 2003 et 2005 par Sofia Coppola et Jim Jarmusch qui
eux aussi, savent ce que c'est que de dérouler une histoire et d'y placer les images qu'il faut, ni trop, ni trop peu, juste comme il se doit, sans enchaîner les plans de montage, sans rajouter
des effets spéciaux, sans oublier d'écrire un scénario avant. Je veux évidemment parler de "Lost in Translation" de la fille de l'autre et de "Broken Flowers"
de l'autre qui n'est donc pas la fille de l'autre. Deux films pour un seul acteur : le roi du rien, de l'absence, du silence : Bill Murray. Je ne vais pas m'épancher sur ces deux-là car il y a
de fortes chances que vous les ayez vu. Mais quel plaisir cinématographique, quelle intelligence dans chaque plan, quelle sensibilité. Et merci à Jim Jarmusch d'avoir mis au goût du jour le
Jazz Ethiopien de Mulatu Astakte dans la B.O, musique fabuleuse que j'avais découvert quelques années plus tôt grâce à Radio Nova et Rémi Colpacopoul, dénicheur de génie grâce à qui tant de
talents sont arrivés jusqu'à nos oreilles.
For relaxing times, make it Sofia Coppola time.
Voilà, c'est tout pour aujourd'hui, vous pouvez retourner travailler (et Liker et passer etc...)