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C'est jeudi, c'est poésie

Je ferme les yeux j'évoque

Le désarroi silencieux

La dénudation le musc

D'une qui venait offrir

Sa grande impudeur musclée

Au donneur de sérénades

Mais qui fut agenouillée

Sa bouche au nœud dur nouée

Ses lèvres incomparables

Closes d'abord sans faiblesse

Puis ouvertes peu à peu

Comme deux battants de portes

Que l'on cesse de défendre

Contre un ennemi trop fort

C'est jeudi, c'est poésie

Le jeu de sa langue ensuite

Experte à flatter la hampe

Après capitulation

Puis à l'envelopper toute

D'une chaude soumission

Sanctionnée de quelque gifle

Avant de l'attirer dans

Le piège des mâchoires

Jusqu'au fond de son gosier

Qui frémira sous les coups

D'un gros bélier brutal

Dont jaillira tout à l'heure

Le flot de liqueur violente

Que sa patience attend

Pour d'un spasme l'avaler

Jusqu'à la dernière goutte

Comme elle eut l'ordre de le faire.

 

André Pieyre de Mandiargues in L'ivre Œil, 1979.

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