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C'est jeudi, c'est poésie

 

Hélas ! Monsieur, ôtez-vous tôt !

- Enda, je vous chatouillerai !

- Madame ici viendra tantôt ;

- Par ma foi, je vous piquerai.

Ecoutez là, quelqu'un j'entends...

Monsieur, vous perdez votre temps.

 

Ôtez la main de cet endroit,

Après, vous n'y avez rien mis.

Je disais bien que l'on viendrait...

Ne me touchez sous mes habits :

Cessez donc de me gazouiller

Et pensez de vous en aller.

 

Autre m'estimez que je suis.

Ne me venez plus harceler ;

Non, Monsieur, ne me fermez l'huis,

Cela ne se pourrait sceller...

Le bel honneur que ce serait

Quand quelqu'un notre fait saurait.

Nu couché, Amedeo Modigliani, 1917.

Nu couché, Amedeo Modigliani, 1917.

Laissez-moi, Monsieur, je vous prie,

Une autre que moi vous faudrait...

Laissez-moi, merci je vous crie,

Car si quelqu'un y survenait

Déshonorée je serais,

Et plutôt mourir je voudrais.

 

Laissez-moi donc ici seulette,

Et vous en allez vitement.

Ne détachez votre aiguillette :

 

Vous êtes ainsi proprement.

Monsieur, ne vous détachez point,

Vous êtes très bien en ce point.

 

Connaître faut devant qu'aimer :

De ce mot-là, soyez content.

Vous ne vous faites qu'enflammer,

Monsieur, ne me tâtez point tant ;

Je vous prie de vous déporter,

Car d'un doux viendrait un amer.

 

Mais qu'est-ce que me barbouillez ?

Je n'entends point de jeu ici...

Vous dites que vous vous jouez

Je ne connais en rien ceci.

Arrêtez-vous, quelqu'un j'entends,

Saint-Jean ! Quel jeu ! Il est dedans !

 

Gilles Aurigny (? - 1553, avocat au Parlement de Paris), in Le Tuteur d'amour, 1547.

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