2 Avril 2009
17.
Benjamin.
Il était fort ce Hans, mais moins que Malko qui se souvenait lors de sa dernière mission avoir accepté ce fameux cinquième verre et ensuite être descendu avec Hans pour l'aider à uriner. Ce
mauvais souvenir lui rappela encore une fois la sulfureuse Lynda, qui ne fermait pas la porte avant de s'accroupir avec toute la grâce du monde sur ce trône en porcelaine. Il aimait la regarder
dans cette position, la culotte sur les chevilles, la robe Versace remontée en ressort sur ses larges hanches de rousse, la toison au trois quart cachée par deux cuisses fermes pour une fois
serrés. Elle se relevait toujours dans un dernier vent qui n'appartenait qu'à elle (certes elle en faisait profiter tout le monde, mais quand on aime, on ne compte pas). "Ha Lynda !" pensa Malko,
"Et la dernière goutte ?" l'interrompit brusquement Hans. "C'est pas les moustachus qui vont me la secouer". Dans ses pensées Malko s'était laissé aller au fameux cinquième verre. Et ce qui
devait arriver arriva, il était en train de secouer le monstrueux membre de l'Autrichien démembré. La scène était cocasse et faisait sourire une sorte d'ersatz de Freddy Mercury, qui d'un œil
lubrique se cirait allègrement le pingouin tout en reluquant nos deux Européens exotiques. Et se cirer le pingouin avec l'œil, c'était pas donné à tout le monde.
Malko était fin saoul, il ricanait bêtement. En partant il tendit sa grosse main velue, celle là même qui avait servi à étrangler l'ignoble docteur Rosenberg'n'stein, en oubliant les moignons de
Hans. Se sentant d'un coup stupide, il lui fit un petit bisou sur la joue, le laissant là dans cette pissotière poisseuse, les cinq membres sortis, "debout" dans le lavabo. Dehors, l'air était
plus frais, cela lui fit du bien. Il ne devait plus penser qu'à une chose la disquette du G7... A cette heure-ci, il était au moins 23 heures du soir, Malko n'eut aucun mal à appeler un taxi pour
l'emmener à l'aéroport (via son hôtel) en levant le bras, signe international d'appel des taxis. Hans aurait bien du mal à rentrer. Un taxi le prit, ainsi qu'un fou
rire...
18.
Nicolas.
Malko se dirigea alors à reculons vers la porte blindée du Fucking Blue Pélican, ce qui relève plus de la démence que d’une quelconque dimension héroïque attribuée par son auteur à son héros. Car, et il faut le reconnaître en toute honnêteté et en toute simplicité, on ne pénètre pas l’univers très mâle du Pélican en présentant un postérieur moulé dans un Smalto beige sans en subir les conséquences. Arrivé à un bon mètre de la porte, celle-ci s’ouvrit comme par enchantement. Malko entra en déplaçant de la main une mèche de cheveux soigneusement rangée derrière l’oreille puis descendit les escaliers quatre à quatre, ce qui, à reculons n’est pas une mince affaire à moins d’être diplômé de l’école du cirque. Et comme Malko ne l’était pas, il trébucha. - « Cirque du l’école fait j’avais seulement si », pensa-t-il. Malko désaoûlait progressivement en se dirigeant vers les toilettes hommes quand il trouva Hans, les moignons secs sur le lavabo. Il l’amena à l’urinoir, secoua l’engin du chef dans l’espoir d’attraper au vol la dernière goutte qui remontait vers l’appendice du cul-de-jatte. Il finit par y parvenir.
– « Goutte dernière la et !» ne l’interrompit pas brusquement Hans. – « Linda Ha ! » pensa Malko. Hans sentit soudainement le superflu de la boisson rejoindre sa vessie. Il ouvrit les yeux et gonfla ses poumons en avalant un soupir. Tous deux remontèrent et, assis face à face, soufflèrent bruyamment dans leur paille pour remplir leurs verres de Fucking Blue Curaçao tout en parlant un dialecte incompréhensible. Les verres pleins, Malko les amena au bar et les échangea contre quelques dôngs (qui comme chacun le sait n’est pas la monnaie cambodgienne, on arnaquait Malko, il ne s’en rendait pas compte). Subitement, tout se figea, les moustaches ne frétillaient plus au souffle des bouches qui s’en approchaient, les moignons de Hans demeuraient étonnamment statiques et les Fucking White Malibu Pineapple restaient fucking blocked entre la glotte et l’œsophage de ceux qui en buvaient. (pas grand monde donc, c’est quand même une boisson de tapettes).
L’action reprit son cours normal, le monde se remit à tourner rond dans le sens des aiguilles d’une montre. Malko redonna ses dôngs au barman contre deux verres de Fucking Blue Curaçao. – « Je l’ai bien entubé » pensa Malko heureux de se débarrasser de ses dôngs. Il retourna à sa table. Au fond du bar, un œil noir l’observait et, comme il n’y avait pas prêté attention la première fois, il ne le remarqua pas non plus cette fois-ci qui n’était autre que la même fois, finalement, en définitive, quand on y pense bien. Un œil sombre et maléfique caressait sa silhouette, un œil qui semblait dire :
« 1976... New York... au bout des docks », un œil mauvais abreuvé de sang et de haine, un œil avec une pupille et une rétine, l’œil de Rocco la Racaille, l’œil de Rocco et son frère.... Malko appela un taxi et n’aurait pas été pris d’un tel fou rire s’il se savait suivi....
19. P.A
20.
Jérôme.
21.
Benjamin.
22.
Nicolas.
Sa bêtise ne pouvait rester impunie. Il devait expier sa faute, procéder à quelque auto flagellation. Il se sentait dans l’obligation morale de s’infliger un châtiment exemplaire. Il serra les dents et se rappela les préceptes de Maître Hö qu’il avait jadis côtoyé lors d’un stage d’apprentissage à la résistance physique au Tibet dans un monastère Shaolin: “ Tu ne souffriras pas quand le mégot incandescent s’écrasera sur ton bras ” (prononcé avec l’accent asiatique). Il s’exécuta mais sentit la douleur atteindre des sommets Tibétains. Sans doute avait-il été distrait par disciple Hï, le jeune moine sodomite avec qui il avait sympathisé quand Maître Hö exposait doctement sa théorie du mégot incandescent. Il se regarda alors dans le rétroviseur, juste histoire de vérifier s’il avait toujours son air méchant. À sa grande surprise, celui-ci avait disparu laissant la place à une expression de benêt bête et brutal. Pour remédier à la situation, il sortit son Panthère à cran de sûreté automatique, celui-la même qui lui avait servi à saigner Germaine Truchon, la gardienne de l’immeuble quand elle lui réclamait ses étrennes. Il approcha l’énorme lame en acier inoxydable de ses sourcils et les rasa.
Ça y est, il avait l’air méchant. Dans un sourire de satisfaction, il vérifia si la balle en argent qu’il réservait à Malko était bien en place dans le barillet de son Walter 736 en acier inoxydable. Tout était en ordre. Il sortit de la voiture et sentit un léger craquement sous ses pieds. Il jeta un coup d’œil furtif vers le sol et repéra un paillasson. « La présence d’un paillasson en cet endroit est fort incongru » pensa-t-il alors il s’y attarda et, dans le secret espoir de trouver une clef, il le souleva. Désolation, désillusion, pas de clef, mais une disquette Macintosh brisée en mille morceaux. « Quelle idée de cacher une disquette Macintosh sous un paillasson » sourit à part soi la Racaille. « Une disquette PC, j’veux bien mais là... ». "Il faudra me venger ”, la sempiternelle rengaine l’interrompit en traversant les tortueuses coursives des tympans de son cœur. De son œil noir, il fixa aussitôt Malko. Ce dernier, tout occupé à besogner Lynda n’avait toujours pas repéré la menace qui planait sur son existence d’agent secret d’origine autrichienne. Une menace prête à fondre sur lui tel le couperet impitoyable de l’épée de Damoclès.
Tout occupé à sa besogne donc, Malko adoptait les nobles attitudes qui avait fait sa réputation de bête assoiffée de luxure jusqu’aux sombres bordels de Biskra. La main à la Seiko, délicatement posée sur la hanche d’une Lynda offerte à 4 pattes et l’autre derrière sa nuque à lui, il ondulait les fesses dans un mouvement de va-et-vient croissant et trempait son croissant dans un mouvement de vient et va décroissant. Quand Malko honorait la femelle, on peut dire que Malko honorait la femelle. Toujours soucieux de ses performances, il n’hésitait jamais à gratifier l’accouplée de quelques remarques bien senties. Il savait que ses mots troublaient l’hypothalamus féminin plus encore qu’un chibre triomphant. Rocco avait de la chance car Malko était en verve aujourd’hui. « Oh Lynda !» susurrait Malko. « Tu es le fourreau, je suis le glaive ! ». « C’est quoi un fourreau? » demandait Lynda.
« Nom masculin, gaine, étui » interrompit Rocco. Malko esquissa un regard en direction de l’opportun. « Tu arrives à propos », glissa Malko dans un souffle court tant les contractions vaginales de Lynda lui faisait frétiller les cordes vocales. « C’est pour ça qu’on m’appelle l’opportun » répondit Rocco avec audace. Les deux hommes se fixèrent méchamment. Gros plan sur les yeux sans sourcils de Rocco. Gros plan sur les yeux de Malko. Gros plan sur les yeux sans sourcils de Rocco. Gros plan sur les yeux de Malko. Malko sortit son harmonica et joua quelques notes morriconesques. Le vent se leva et souleva la poussière. Gros plan sur les yeux sans sourcils de Rocco. Gros plan sur les yeux de Malko. « Maintenant oui ! »hurla Lynda. Malko vida son chargeur sur Rocco et ses couilles dans Lynda (et non pas l’inverse).
23.
Benjamin
Une fois à l’abri, il tira son second coup de feu en direction de Rocco, l’immondice était donc sur ses traces depuis la page 3 du présent ouvrage. Dire qu’il ne s’en était pas aperçu, pourtant, il le savait, les menaces de mort étaient quotidiennes. Un jour, il découvrit un scorpion dans une de ses chaussettes Calvin Klein, le jour suivant une mygale dans son tube de gel coiffant “ fixation extra forte ”. Chaque fois le même message en lettres de sang sur sa porte d’hôtel : Do not disturb. Il ne savait pas ce que cela voulait dire, mais il savait que c’était un mauvais présage. La troisième de ses balles toucha en plein cœur la pierre derrière laquelle se cachait Rocco. Les quatrième, cinquième et sixième projectiles partirent tous dans des directions qui, à quelques dizaines de mètres près, étaient la même. Rocco et son projectile unique attendirent le moment propice.
Entendant au bout de quelques instants des clic, clic, clic, clic, suivis de « Darling, auriez vous quelques recharges en sus ? », la Darling en question ne comprit qu’un seul des mots de l’agent parfois trop secret pour sa capacité intellectuelle. Elle lui répondit par un clin d’œil entendu. Le coup de Rocco partit, il se leva d’un bond au ralenti, le bras tendu, le visage déformé par la haine, se répétant inlassablement cette rengaine vengeresse, « Il faudra me venger ». Au ralenti toujours, la balle d’argent fendit l’air… Les six yeux fixés sur ce petit suppositoire assassin. Rocco bavait d’impatience, Lynda, nymphomane monomaniaque, bavait elle aussi, Malko avait la bouche sèche. Un petit schtoung vint briser ce qui aurait vite pu se transformer en monotonie monotone. Le temps reprit son cours normal, Rocco, l’air moins léger que dans le ralenti se précipita vers son bolide diabolique (une 12 pour mémoire). Se retournant une dernière fois vers celui qu’il appelait intimement depuis 76 « Ducon », il lui lança avec hargne : « Je t’aurai Malko, je t’aurai et ce jour-là, je danserais sur ta tombe en buvant de la bière et c’est dommage, parce que tu ne seras pas là pour profiter du spectacle. Ha ha ha ha ha ha ha. »
En riant
et conduisant, il percuta ce qu’il pensait être un cerisier en fleur du japon. L’arbre en question n’était autre qu’Elko, le compliment de l’arbre était le premier qu’on lui faisait, mais aussi
le dernier, une 12, ça ne laisse aucune chance. La voiture s’enfuit vers le soleil couchant en laissant derrière elle un nuage de poussière digne d’un des plus beaux pets de Lynda sur une plage
de sable fin, la pétomane érotomane comme se surprit à la surnommer Malko en se retournant vers elle. Lynda était adossée à un arbre, comme dans un poème de Rimbaud, plus belle que jamais, le
visage impassible, un simple trou sur le côté laissant écouler le reste de vie de la belle. « Je suis seul maintenant » se dit l’Autrichien perspicace. « Et la disquette est
niquée ».