29 Décembre 2011
... Il ouvre les volets, regarde le paysage, les bleus du ciel car il y en a mille et un, les ocres lourds qui tirent vers l'or, les verts infinis autour de lui, les gris que la brume étire à l'horizon en milliers de teintes suaves et délicates. Il se dit qu'aujourd'hui, il va partir dans sa vieille voiture qu'il conduit si mal mais qui le mène à bon port pour trouver son sujet. Il descend les escaliers de granit, enfonce ses godillots dans la rosée du matin, passe le lourd portail de bois, déambule à travers les ruelles, salue quelques visages familiers et s'en va chercher l'inspiration pour nourrir les toiles immaculées de son talent. Il est facile de comprendre pourquoi, après un voyage en Sicile, Nicolas de Staël a craqué pour le Castelet, bâtisse du XVIe siècle sur les hauteurs de Ménerbes. Elle lui rappelle la citadelle Pierre et Paul à Saint-Petersbourg, théâtre de ses jeunes années, que son père le Général Vladimir Ivanovitch de Staël von Holstein commandait avec rigueur. Alentour, les couleurs accablées du soleil du midi lui font revenir en mémoire celles qui l'avaient tant impressionné lors d'un de ses premiers voyages en Italie puis au Maroc alors que son adolescence se terminait à peine. Ménerbes, sa chaleur, sa lumière, sa hauteur de vue, tout ceci ne pouvait échapper à l'œil de Nicolas de Staël. Et comme lui, j'en suis tombé amoureux au premier regard. Coup de foudre. Coup de fouet. Coup de cœur.
"On ne peint jamais ce qu'on voit ou croit voir. On peint à mille vibrations le coup reçu, à recevoir,
semblable, différent."
"Ce que j'essaie, c'est un renouvellement continu et ce n'est pas facile. Ma peinture, je sais ce qu'elle est sous ses apparence, sa violence, ses perpétuels jeux de force. C'est une chose fragile, dans le sens "bon", du "sublime". C'est fragile comme l'amour."
"Je crois que je m'oriente vers une peinture plus lumineuse et cela me met dans un état désagréable d'agitation permanente."
"Tout doit se passer en moi. c'est avec le besoin intérieur, intime qu'il faut dessiner et ce n'est que comme cela que je ferai si je puis, du bon, dessin, de la bonne peinture."
"Plus vous saisirez que l'expression, c'est tout chez moi comme on ouvre une fenêtre, plus vous comprendrez que je ne peux l'arrêter en finissant les choses."
"Lorsque ma peinture devient bonne, je sens toujours atrocement une grande part de hasard, comme un vertige, une chance."
"La seule recherche sérieuse dans un tableau, c'est la profondeur. Et un tableau, c'est un espace organisé. (...) L'espace pictural est mur mais tous les oiseaux du monde y volent librement,à toutes profondeurs."
"Il y a très peu de tableaux que je vois dans leurs dimensions exactes, que ce soit de souvenir ou face à face, et mes dimensions à moi, c’est franchement du hasard parce que je crois au hasard et non à la dimension exacte. je crois au hasard exactement comme je vois au hasard, avec une obstination constante, c’est même cela qui fait que, lorsque je vois, je vois comme personne d’autre."
"Je vais aller sans espoir jusqu'au bout de mes déchirements, jusqu'à leur tendresse."
"Il faut s’habituer à finir plus sans finir, ce n’est pas facile."
"Travailler beaucoup, avec une tonne de passion et cent grammes de patience."