3 Mars 2014
(maj : désolé, le texte avait sauté)
J'adore Boulogne-Billancourt. C'est ma ville, j'y suis né et j'y réside. Certes, en général, ceux qui ne connaissent pas bien Boulogne n'en ont qu'une vision parcellaire. Boulogne la bourgeoise, Boulogne l'austère, Boulogne la froide, la vieillotte, Boulogne ville à fond à droite depuis 40 ans. C'est pas faux. Mais ça évolue, ça se transforme, ça se rajeunit et ça s'améliore un peu plus tous les jours. SHAG, sa meilleure galerie d'art soit dit en passant (voir ici : http://s-h-a-g.fr), y contribue aussi. Mais ce qui me fait surtout aimer Boulogne, c'est sa particularité : Boulogne est double, schyzophrène. Car contrairement à une majorité de villes, Boulogne ne s'est pas faite autour d'un cœur (en général l'église) mais de deux. Alors bien sûr, la première pierre de l'édifice boulonnais, ce fut l'église, copie de celle de Boulogne-sur-Mer, érigée en 1319 et 1320 et qui fédéra ses premiers habitants.
Mais Boulogne, c'est surtout un cœur populaire et ouvrier. Quand Louis XIV s'installa à Versailles, tous les nobles de la cour passaient par la toute nouvelle route pavée (l'actuelle avenue Jean-Baptiste Clément, prolongeant les deux ronds-points en haut de la carte) reliant Passy à Saint-Cloud. Et comme tous ces nobles avaient beau être nobles, ils étaient sales quand même, ils laissaient leur linge sur leur passage vers Versailles à des blanchisseurs fraîchement installés et le récupéraient au retour.
Sur cette carte de 1740 montrant les premières voies percées vers Saint-Cloud puis Versailles, j'ai rajouté quelques points de la ville pour s'y retrouver. Le point en haut est l'église de Boulogne avec son premier lotissement de blanchisseurs à côté (le quartier des Menus). Les deux points plus bas sont les emplacement actuels de la mairie (à gauche) et la place Marcel Sembat (à droite, donc). Hors limite de notre Boulogne actuelle, j'ai également indiqué l'emplacement du Parc des Princes (on ne se refait pas) et de la Porte de Saint-Cloud.
On ne peut évoquer le passé populaire de Boulogne sans parler de Renault, des trois huit qui font que les écoliers boulonnais sortent encore à 16h au lieu de 16h30 à Paris, cette mixité sociale, internationale et ce haut-lieu de l'industrialisation française qui fit aussi le Boulogne que j'aime. Donc Boulogne populaire, ouvrière mais Boulogne dotée d'un deuxième cœur. Une Boulogne créatrice, innovatrice, terrain de toutes les révolutions qui façonnent encore notre quotidien : l'aviation avec les frères Farman, Voisin, Delagrange, les arts avec les salons tenus par les grands bourgeois en villégiature, accueillant Chagall, Landowski puis des architectes de renom comme Le Corbusier, Dujarric, Mallet-Stevens, Pingusson, la photographie avec Albert Kahn, le cinéma avec les studios de Billancourt et ceux de Boulogne ensuite.
Mon quartier, celui des Menus, est le plus ancien de Boulogne. C'est d'ici que la ville est née et après 1870 et l'exode de centaines d'italiens qui fuyaient Saint-Cloud dévastée et incendiée, c'était un quartier populaire et vivant comme en témoignent ces images de début 1900. Bon, au bout de ma rue, c'était la place des exécutions capitales jusqu'en 1750 et maintenant c'est un peu moins commerçant qu'il y a un siècle mais c'est toujours très sympa, surtout le samedi et le dimanche car la SHAG est ouverte de 12 à 19h juste à côté du Parc Rothschild au 26, rue Mahias.
Boulogne, je l'ai photographiée, cartographiée rue par rue afin de chasser ses vieilles boutiques pour le projet "Des plumes dans l'œil" exposé à La Blanchisserie en 2006 (voir ici : flickr.com/photos/pagillet/sets). Boulogne, je l'ai arpentée centimètre par centimètre, découvert ses passages secrets, son histoire pavé après pavé, j'ai suivi avec tristesse le démantèlement de l'Île Seguin (voir ici www.flickr.com/photos/pagillet/sets/72), j'ai connu "Le Chat Noir", bar louche et désagréable à souhait, le burger dégueulasse à Marcel Sembat, j'ai vécu le chantier du centre-ville devant mes fenêtre (j'habitais boulevard Jean Jaurès à l'époque) et j'écoutais le boucher de la rue du Parchamp, célèbre pour ses carottes rapées, me raconter qu'il n'y avait là que des champs quand il était enfant. Boulogne, je la connais mieux que ma poche qui est somme toute simple à connaître. Et je l'adore cette ville (voir encore là photos/pagillet/sets/721) pour toutes les raisons évoquées ci-dessus.
Tout ceci pour vous dire que si vous aimez aussi votre ville, il y a les municipales qui arrivent. Et autant, la politique, bon on sait ce qu'on en pense, autant les municipales, c'est important pour votre vie, votre quotidien et votre ville. Alors quelque soit votre choix (un peu limité ici entre UMP officiel/officieux), n'oubliez pas d'aller voter le 23 et 30 mars pour le candidat de votre choix. Et si vous êtes boulonnais et boulonnaise et que vous voulez bien rigoler sur Twitter suivez le hashtag #MUN92100 pour ne rien louper. C'est assez savoureux, tel un plat d'enchiladas à peine décongelés au Rancho un samedi soir.