5 Avril 2017
Il y a quelques jours, le 31 mars, on fêtait les 25 ans de la fermeture des usines Renault sur l'Île Seguin. La dernière voiture, une Supercinq, sortait des chaines. Le cœur d'un monument vivant cessait de battre soudainement. Plus de bruit, plus de vibrations, plus rien. Des pans de ma ville et de notre société, les luttes sociales, les grèves, le congés payés, la fraternité entre peuples, allaient lentement s'effacer. L'île Seguin, près de 30 000 ouvriers y travaillaient, un monstre de verre et d'acier qui absorbait chaque matin des milliers d'hommes en bleu pour les recracher lessivés à la nuit tombée.
Passionné par ce lieu unique, j'avais suivi très régulièrement le démantèlement de ce vieux paquebot en 2005. Triste spectacle que cette mise à mort lente, effacement de la mémoire, de la sueur, du sang, de son âme. Depuis, à part la Seine Musicale qui a fleuri en amont, le reste est un énorme désastre, entre l'opportunité ratée de la Fondation Pinault aux lamentables projets de bétonnage outranciers de Jean Nouvel et d'autres projets régulièrement avortés. La chèvre, c'était nous, pauvre monsieur Seguin. Et on n'est pas encore sorti de l'auberge.