... Il y a deux ânes sur mon terrain de foot à la campagne. Je ne peux plus mettre de lucarne avec mon ballon car le but, mon but,
est devenu leur maison. Là où je m'entraînais furieusement à Michel Platiner avec mon frangin, cette vieille grange avec une grande ouverture rectangulaire parfaite pour faire au moins des
finales de coupes du monde aux tirs aux buts et que c'est moi les Argentins, ah non, t'as déjà pris les Argentins la dernière fois, bon, ok, je prends les Français pfff... cette grange est
devenue le repère de deux ânes ni bougres, ni même bâtés. Le premier s'appelle Rodéo et le second Bob. C'est Bob dit l'âne. Oui, c'est mauvais, je sais. Mais c'est comme ça, il
s'appelle Bob. J'avais proposé Francis La aussi mais ça n'a pas été retenu finalement, c'est dommage. Et il y avait Pedro aussi, bien sûr mais c'était un peu facile.
Bob et
Rodéo n'ont absolument aucune idée qu'ils foulent chaque jour le Maracana de ma mémoire footballistique, la Bombonera de mes plus beaux exploits à tâter du cuir, le Parc des Princes de la
demi-volée imparable du coup de pied. Ils ne savent pas ce qu'est une contrôle orienté admirablement réussi, ne connaissent rien du plaisir quasi indicible, mais je vais tenter malgré
tout, d'un coup franc bien brossé quand la courbe de votre frappe vient irrémédiablement supprimer dans un souffle de génie la toile d'araignée qui se trouvait là depuis des lustres, ils ne se
doutent pas que l'extraordinaire qualité technique dont je dispose balle au pied et que je n'ai jamais cherché à développer plus en avant pour ne pas nuire à la carrière de Zinedine
Zidane, tire ses origines de chacune des mottes de ce terrain désormais régulièrement crotté sans vergogne par leurs soins tandis qu'ils me narguent d'un braiment intense qui veut dire "Tu sais
ce qu'on lui dit à ton Maracana mon gars ?" Mais le pire, c'est qu'ils sont sympa, ces ânes. C'est débonnaire, affectueux, c'est un peu comme un croisement entre un cheval et un chien. Ca se
pose par terre comme un chien. Ca se roule sur le dos comme un chien, un chien de 250 kilos mais un chien quand même. Ca ne sait pas ramener la baballe comme mon chien qui, lui, sait jouer au
foot aussi bien que Gabriel Heinze. Mais j'ai encore une quarantaine d'années pour leur apprendre la beauté de la roulette, la talonnade et la reprise de volée. C'est pas gagné avec des sabots.
Mais Ravanelli y arrivait bien avec l'Olympique de Marseille alors pourquoi pas eux ?
Oublions le ballon rond un instant, soyons primesautiers et guillerets et sautons du coq à l'âne ; justement, comme c'est amusant,
parlons de cette expression, tiens, et pourquoi pas, alors, non mais ho. "Sauter du coq à l'âne" se disait originellement "Saillir du coq à l'âne" et l'âne en question, n'était pas le fier
solipode porteur de charges harrassantes que l'on pourrait imaginer ou voir ci-dessus et dessous, mais bel et bien la femelle du canard, la cane. Car jusqu'au XIIIeme siècle, "ane" sans ^
signifiait femelle de canard, donc cane. Enfin Ane. Et que donc, en résumant, "saillir du coq à l'âne" se disait quand cet abruti de coq pas tout à fait réveillé, tentait de se taper une cane
plutôt qu'une poule pour changer un peu car le cul de poule, ça va 5 minutes alors que le pied de poule peut être sympa à l'occasion. D'où sauter du coq à l'âne, soit passer à quelque chose qui
n'a rien à voir même si on peut dire Salut ma poule et Salut ma cocotte mais c'est un exemple pourri car on peut aussi dire Salut ma Biquette alors ça ne rime à rien.
Et pour ce qui est du mythe de l'âne idiot, regardez l'image ci-dessous. Il n'a peut être pas inventé la lumière à couper le beurre en poudre mais pour profiter du soleil de fin de journée,
l'âne, Bob en l'occurrence, se sert de de la réflexion sur le mur pour se faire une belle peau avant la nuit, des fois que Catherine Deneuve arrive à l'improviste car elle a besoin d'un manteau.
En résumé, pas de peau ni de pot : la bêtise de l'âne a bougrement bon dos.
La semaine prochaine, si vous êtes bien pas sages du tout, Tonton PA vous donnera l'explication du célèbre : "Les mouches ont changé d'âne" de Pierre
Albaladejo.
Si avec tout ça, vous passez pour un âne, vous ne méritez rien d'autre qu'un bonnet. Phrygien, bien sûr.