30 Septembre 2015
Mais quelle mouche avait donc piqué Sateen Morendo, la célèbre danseuse de saloon (voir ici les-petroleuses), fidèle soutien de l'ex sherif Shark Ozzie ? Certainement pas une mouche tsé tsé vu son état d'excitation et sachant qu'en plus, l'action se passe à Chihuahuan à l'ouest du Pécos en plein Nouveau-Mexique alors voyez, les diptères bridés, c'est pas trop couleur locale. Mais revenons à Sateen qui, en plein tour de chant (enfin, levage de jambes) sur la scène avait soudain hurlé à la cantonnade (ce qui ne veut pas dire que le public venu en nombre était d''origine asiatique) que les seuls vrais Chihuahuaiens étaient les Chihuahuahiens de race blanche. Comme ça. De but en blanc. Et de blanc en basané et de basané en franchement noir. Car l'assistance était fort disparate à Chihuahuan et chacun s'efforçait de faire au mieux pour vivre, du moment qu'il restait du whisky, de la donzelle frivole et un peu de viande séchée. C'est pourquoi la saillie de Sateen avait tant étonné. Mais les habitués du saloon savaient qu'elle souffrait, certes d'accès de débilité aïgue par instants, mais surtout de somnambulisme et que la nuit, elle se baladait un drap sur la tête partout dans Chihuahuan. Un jeune chanteur du coin, Mo Diblews s'en était d'ailleurs inspiré pour écrire une chanson : "Nights in white, Sateen".
Était-ce son harassant travail de poissonnière le vendredi en sus de ses tours de chant galipettes au saloon qui lui avait tapé sur le système ? Il faut dire que pour avoir du poisson frais en plein désert, ce n'était pas une sinécure et le soleil tapait dur sur les calebasses, même bien blanches et bien blondes. Sateen, qui d'ordinaire, faisait tout pour plaire à Shark Ozzie, s'était soudainement émancipée et crachait des insanités de ses yeux revolvers et de son regard qui tue à la face du monde chihuahuaien qui, touché, n'aimait pas ça, c'est foutu.
Shark lui-même n'en revenait pas. Pourtant, son célèbre discours sur "L'homme mexicain qui n'était pas rentré dans l'histoire" et les traits d'esprit si délicats de ses amis Klaus Gayhand (le desperado onaniste d'origine allemande, voir ici pour-une-poignee-de-connards) et Bryce Hurtafew, son porte-flingue préféré (voir un-cercueil-pour-un-sheriff) résonnait encore dans les têtes à Chihuahuan. Et lui avaient coûté son poste. Dans sa tentative désespérée de regagner son étoile de sherif pour éviter les nombreuses affaires qui lui collaient au cul tel un morceau de chatterton à la semelle, Shark ne pouvait laisser passer la chance de se montrer à nouveau en chevalier blanc même si c'est fort incongru en plein Far West et que l'armure par 50° à l'ombre relève plus du micro-ondes que de la bonne idée. Mais si les feuilles mortes se ramassent à la pelle, les bonnes idées, c'est une autre histoire et Oncle Paul n'est pas disponible en ce moment, il est en train de bourrer sa pipe. Bref, malgré les amitiés passées, les heures yeux dans les yeux et le chabadabada, Shark charcla et demanda l'exclusion de Sateen du saloon.
Sateen n'était pas née de la dernière danse de la pluie et ne se laissa pas faire. Virevoltant tel un tomahawk lancé à pleine vitesse, elle sortit promptement du saloon et jura ses grands dieux (bon, surtout un avec son fils épineux babacool plein de trous) qu'on ne l'y reprendrait plus et qu'elle allait dézinguer Shark Ozzie. Fort heureusement, elle était danseuse de saloon et non pistolero. Ses talons hauts, trop hauts, passèrent au dessus de la tête de Shark Ozzie qui n'eut même pas besoin de se baisser.
Devenue persona non grata, Sateen Morendo comprit, pour une fois, que le vent tournait pour elle. Enfourchant son destrier, elle quitta Chihuahuan en dodelinant de sa tête mise à prix. Bon, pas cher, car ce n'était pas forcément le plus intéressant chez elle. Comme pour le poisson.
* Pardon aux amateurs de Jane Russel (dont je suis) pour ce montage éhonté dont je ne suis pas fier, tiens, je me fouette, schlak, schlak, schlak, tiens, du goudron et des plumes.
Tous les épisodes de Shark Ozzie et ses amis ici : la vie est un western