L'or de McKinsey

... C'était le bout de la piste, les ultimes instants de la charge héroïque, de la chevauchée fantastique, de la poursuite infernale, de la dernière carav... bon, ok, on a compris. En bref, la campagne électorale pour le poste de shérif de Chihuahuan touchait à sa fin et il semblerait que Mareen Nepel et Manny Macrone se retrouvaient au coude à coude à quelques encablures de la ligne d'arrivée de la ruée vers l'or de McKinsey. Un gros pactole sur lequel Manny avait mis la main pendant son mandat. Mareen et Manny se retrouveraient très probablement en finale comme il y a cinq ans avant que Manny ne s'empare de l'étoile tant désirée. Comme il y a vingt ans quand Jack Chayrak, le desperado amateur de bière mexicaine avait largement battu le paternel de Mareen. Une blessure familiale. Un affront. Bas, mais un affront. Et national, en sus.

Si Manny Macrone et Mareen Nepel caracolaient en tête, il ne va pas sans dire (donc on va le dire) que Valree Peckwest était en mode PLS (Putain, La Salope en version originale dans le texte adressé à Mareen). Valree ne comprenait pas pourquoi Shark Ozzie ne la soutenait toujours pas ni pourquoi elle était si basse dans les intentions de vote des habitants de Chihuahuan. Mais d'un autre côté, elle avait tout foiré depuis le début. D'abord en singeant la voix du célèbre Général de Goal, puis en reprenant les thèses immondes de Ricky Zemore ou de Mareen et enfin, parce qu'elle avait un charisme de cactus. Et encore, un cactus, parfois, ça pique.

Ricky Zemore, malgré son immense estime de lui-même et sa psychopathie quotidienne, commençait à comprendre que ça sentait le roussi pour lui aussi. Mais il continuait à sortir ineptie sur ineptie, persuadé que les habitants blancs de Chihuahuan ne voulait plus de tous les Mexicains, Indiens et autres basanés ou bridés. Pourtant, sans Kim-Yeu-Yeu, le blanchisseur, Chihuahuan aurait été encore plus sale. Sans les Mexicains, plus de chili et plus de tequila. Sans les Indiens, plus de bison séché. Mais Ricky n'en démordait pas et voulait réémigrer tout le monde. Dans un pays où tout le monde était fraîchement émigré, à part les Indiens. Va comprendre. Bientôt, Ricky retrouverait sa vraie place : dans la fange de l'enclos à cochons et encore, après avoir déplacé les cochons pour qu'ils ne soient pas contaminés.

Un autre homme y croyait encore dur comme fer : Mel Henchon. Mel sentait qu'il était à ça de damer le pion à Mareen pour accéder au second tour. Un peu comme il y a cinq ans quand il avait été à ça (600 voix) de la finale face à Manny Macrone. L'histoire semblait se répéter pour Mel mais il continuait vaille que vaille à s'imaginer au poste suprême en préparant des discours fleuves de cinq à six heures comme le faisait une de ses idoles. Après tout, Custer avait cru pouvoir gagner Little Big Horn, Lee avait cru pouvoir confédérer tout le monde et Billy le Kid avait cru pouvoir descendre Pat Garrett. L'histoire de l'Ouest était pleine de rebondissements mais Mel Henchon manquait un peu de souplesse pour pouvoir y arriver. Mel en sucre.

Quant à, ha ha ha haaaaaa, Hilda Gogo, elle touchait déjà le fond avec des intentions proches de celles de Nick Bridgevoid (un cowboy d'origine française noble qui avait anglicisé du Pont de Néant, son vrai nom). C'est dire si elle était tombée bas. Mais vraiment très, très bas. Même le fond du Grand Canyon était plus haut. Même l'honneur de Shark Ozzie était plus élevé. Quoique. On demandera à l'agence Pinkerton de vérifier par acquit de conscience.

Restait bien sûr Yah-Jeek-Nah-Do (Celui-Qui-Parle-Du-Vent-Dans-Les-Collines-Comment-Quoi-J'entends-Pas) qui observait tout ça de loin dans ses plaines verdoyantes, prêt à enfourcher son appaloosa Tok-Tok (Cause-Toujours-Tu-M'intéresses) si jamais un miracle se produisait. Mais les miracles, c'était bon pour Lourdes. Et de Chihuahuan, ça faisait un peu loin.

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