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Kolya

Dixième opus sur 13 nouvelles après Twisting the night away la semaine dernière.

 

 

Kolya

 

Le soleil se levait sur le fort d'Antibes réveillant les ocres sacrés, chassant les ombres modelées. Au loin, les voiles se prenaient pour des fanions trimballés de cap en cap au gré des premiers caprices d'Éole. Le géant regardait ces confettis sur toile cirée sans être tout à fait là. Juste las. Les couleurs chaudes du matin lui remémoraient la Toscane, la Sicile qu'il avait tant aimées, Agrigente et ses pierres délabrées dont le charme ne le quittait pas. Les citadelles l'avaient toujours accompagné depuis celle qu'il avait dû quitter tout là-haut dans le nord. Dans le froid. Dans la neige. Dans le sang. Ici, au moins, il faisait bon. Comme à Ménerbes là-bas, sa maison forte, sa forteresse, sa force maîtresse. Il le regrettait, son castelet. Et Jeanne. Il regrettait Jeanne. Jeanne lui manquait. Jeanne lui coupait l'oxygène. Jeanne lui donnait, reprenait, ne pouvait promettre, ne pouvait donner. Jeanne et son corps de liane. Jeanne ne viendra pas. Jeanne. Jamais plus.

 

Au ciel rougeoyant des échos de la nuit répond cette toile tendue sous les toits. Six mètres par trois cinquante. Un colosse. Un vertige. Le piano y est posé, les partitions prêtes pour la symphonie, le rideau attend les artistes. Mais Kolya n'entend plus la mélodie. Elle se brouille, se disperse, comme la fumée de sa cigarette qui se dissipe dans l'immensité de son atelier.

 

Il n'y aura plus d'illumination. Plus de renouvellement continu. Seul reste le vertige et cette ultime toile de fond. Ce macadam gris qui l'attend plus bas. Kolya enjambe le parapet. Kolya ferme les yeux pour la dernière fois.

 

Kolya
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